Les conditions d’éligibilité aux élections municipales et les cas d’inéligibilité et d’incompatibilité avec le mandat de conseiller municipal

A l’approche des prochaines échéances électorales, nous tenons à rappeler aux élus et candidats potentiels des conditions d’éligibilité, leur permettant de se présenter aux élections municipales. Il convient aussi d’évoquer les cas d’inéligibilité et d’incompatibilité empêchant certaines personnes de devenir conseillers municipaux. En effet, le droit de se présenter aux élections municipales repose sur plusieurs conditions cumulatives fixées par le Code électoral. Ce sont les suivantes :

a) Tout d’abord, le candidat doit être âgé d’au moins 18 ans révolus à la date du scrutin (article L.228 du Code électoral alinéa 1er) et non au jour de la candidature (CE, 29 novembre 1912).
b) Ensuite, le candidat doit être de nationalité française ou ressortissant d’un État membre de l’Union européenne, à condition de résider depuis plus de six mois en France et d’être éligible dans son pays d’origine. Dans ce dernier cas, il peut être élu conseiller municipal mais ne peut pour autant prétendre au poste de maire ou d’adjoint et ne participe ni à la désignation des électeurs sénatoriaux, ni à l’élection des sénateurs. Le ressortissant d’un Etat membre de l’UE ne peut être élu qu’en tant que conseiller municipal ordinaire (simple) depuis le traité de Maastricht de 1992. Cette exception découle de l’article 88-3 de la Constitution, qui encadre la participation des citoyens européens aux élections locales en France. Les citoyens de l’UE peuvent donc être inscrits sur une liste électorale complémentaire uniquement pour les élections municipales et européennes (articles L.44 et L.O.228-1 du Code électoral).
c) Une autre condition d’éligibilité est celle consistant à démontrer « avoir satisfait aux obligations de la loi instituant le service national » (articles L.45 du Code électoral et L.111-1 à L.111-2 du Code du service national). Nul ne peut être élu s’il n’a pas rempli l’obligation de recensement et l’obligation de participer à la Journée défense et citoyenneté (JDC) se substituant à partir de 2011 à la Journée d’appel de préparation à la défense (JAPD) en application des articles L.113-4 et L.114-6 du Code du service national. À la fin de cette journée, il est remis à chaque citoyen un certificat individuel de participation à la JDC. Ce document certifie qu’une personne y a bien participé conformément à la loi (article L.114-2 du CSN).
d) Au-delà des conditions personnelles, il faut justifier d’un lien effectif (attache tangible) avec la commune dans laquelle on se porte candidat. Concrètement, il s’agit d’être inscrit sur les listes électorales de la commune (article 11 du Code électoral) ou de figurer au rôle des contributions directes en vertu de l’article L.228 du Code électoral. Cet article L.228 du Code électoral dispose dans son alinéa 2 que « sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu’ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l’année de l’élection (…) » . Deux catégories de groupe sont donc visées : les électeurs et les citoyens. Ainsi, cela implique nécessairement d’interpréter cette disposition comme conférant l’éligibilité soit aux électeurs de la commune, soit aux citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu’ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l’année de l’élection. Cette condition d’éligibilité doit être entendue comme posant deux critères alternatifs. Il est donc possible pour un citoyen s’acquittant de contributions directes dans une commune, sans y avoir la qualité d’électeur, de pouvoir être éligible dans cette commune. En revanche, il est parfaitement possible pour une personne ayant la qualité d’électeur d’une commune, sans être inscrit au rôle des contributions directes, de pouvoir prétendre à l’éligibilité aux élections municipales (CE, 7 janvier 2015, Élections municipales de Cazères, n°382820). Trois cas de figure permettant d’être éligible au titre de cette condition de lien de rattachement effectif avec la commune se définissent ainsi :

1) Être électeur de la commune (possibilités de s’inscrire sur les listes électorales)

Aux termes du I de l’article L.11 du Code électoral, peuvent être inscrits sur les listes électorales :
«  Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis 6 mois au moins et leurs enfants de moins de 26 ans (sur ce point, a pu être rappelée la définition d’un domicile réel en comparaison avec la notion factuelle de résidence dans une réponse ministérielle publiée dans le JO du Sénat du 23 janvier 2014, p.229) ;
Ceux qui figurent pour la deuxième fois sans interruption, l’année de la demande d’inscription, au rôle d’une des contributions directes communales et, s’ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux. Tout électeur ou toute électrice peut être inscrit sur la même liste que son conjoint au titre de la présente disposition ;
2° bis Ceux qui, sans figurer au rôle d’une des contributions directes communales, ont, pour la deuxième fois sans interruption l’année de la demande d’inscription, la qualité de gérant ou d’associé majoritaire ou unique d’une société figurant au rôle ;
Ceux qui sont assujettis à une résidence obligatoire dans la commune en qualité de fonctionnaires.
Le II de ce même article prévoit que « sous réserve qu’elles répondent aux autres conditions exigées par la loi, sont inscrites d’office sur la liste électorale de la commune de leur domicile réel :
- ceux qui acquièrent la majorité à la date de ce scrutin ou, s’il y a un second tour, à la date de ce second tour.
 ceux qui acquièrent la nationalité française
 ».

2) Être inscrit au rôle des contributions directes

Le candidat doit être personnellement inscrit au rôle, peu importe qu’il soit assujetti ou pas à une taxe et peu importe qui acquitte en fait cette taxe. Cela signifie que son nom doit figurer expressément sur les rôles fiscaux de la commune. A ce titre, les contributions concernées sont la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, les taxes foncières (sur les propriétés bâties et non bâties) et la cotisation foncière des entreprises. Quelques exemples de cas permettant de répondre à cette condition :

 le propriétaire d’un étang est inscrit au rôle des contributions directes car il est redevable de la taxe foncière sur les propriétés non bâties ;
 l’inscription du mari au rôle, au titre d’un appartement acquis en commun par les époux, profite à l’épouse. Cette dernière est dès lors éligible (CE, 23 décembre 1966 n°67312) ;
 tant que la mutation cadastrale n’a pas été faite, les héritiers d’un propriétaire décédé sont chacun tenus au paiement de la taxe foncière en fonction de leur part dans l’indivision. Ils sont donc tous éligibles (CE, 14 novembre 2008 n°317661).
Quelques exemples de cas ne permettant pas de répondre à cette condition :
 le contrat de location d’un garage ne permet pas de justifier de l’éligibilité d’un candidat dans la mesure où il n’établit pas que ce garage constitue une dépendance d’un immeuble d’habitation ;
 le paiement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ne permet pas l’inscription au rôle ;
 l’occupant même régulier d’un appartement loué via Airbnb n’a pas la qualité de contribuable.

3) Justifier devoir être inscrit au rôle des contributions directes au 1er janvier de l’année d’élection

Le candidat non-inscrit au rôle des contributions directes doit apporter la preuve qu’il aurait dû figurer sur cette liste au 1er janvier de l’année de l’élection. Pour ce faire, le candidat doit produire des pièces jugées suffisantes prévues à l’article R.128 du Code électoral, comme, par exemple :
  Une copie de l’acte de propriété, accompagnée d’une attestation notariale, établissant que l’intéressé est copropriétaire en indivision d’un immeuble à usage d’habitation situé dans la commune (CE, 28 décembre 2001 n°235358).

e) Nul ne peut être candidat dans plusieurs communes, ni sur plus d’une liste (article L.238).
f) Enfin, il faut jouir de ses droits civiques et politiques, c’est-à-dire ne pas avoir été privé du droit de vote et ne pas être sous tutelle ou curatelle (article L.230 du Code électoral).

Il y a également plusieurs critères d’inéligibilité et d’incompatibilité avec l’exercice du mandat de conseiller municipal. Les cas d’inéligibilité interdisent de se présenter aux élections municipales.

Parmi les inéligibilités tenant à la personne figurent ainsi le cas des conseillers municipaux ayant refusé de remplir une des fonctions qui leur sont dévolues par les lois sans excuse valable et déclarés démissionnaires par le tribunal administratif, et ce pour une durée d’un an suivant la notification de cette décision (article L.235 du Code électoral). De même, les ressortissants des États membres de l’Union européenne autres que la France déchus du droit d’éligibilité dans leur État d’origine sont inéligibles en vertu de l’article L.O.230-2 du Code électoral. Les inéligibilités au mandat de conseiller municipal tenant aux fonctions exercées figurent dans le Code électoral aux articles L.230-1 et L.O.230-3 du Code électoral visant notamment le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et le Défenseur des droits pendant la durée de leurs fonctions. Par ailleurs, l’article L.231 du Code électoral instaure des règles d’inéligibilité relatives (par opposition aux inéligibilités absolues citées ci-dessus). Ainsi, « ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois :

  Les magistrats des cours d’appel, des tribunaux judiciaires ainsi que les membres des tribunaux administratifs et des chambres régionales de comptes (CRC)
  Les officiers et sous-officiers de gendarmerie ainsi que les officiers supérieurs et généraux des autres corps militaires
  Les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale
  Les directeurs et les chefs de bureau de préfecture et les secrétaires en chef de sous-préfecture
  Les comptables des deniers communaux agissant en qualité de fonctionnaire et les entrepreneurs de services municipaux (avec exceptions)
  Les préfets de région et les préfets dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de trois ans ; les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture, les directeurs de cabinet de préfet depuis moins de deux ans ; les sous-préfets chargés de mission auprès d’un préfet et les secrétaires généraux ou chargés de mission pour les affaires régionales ou pour les affaires de Corse dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins d’un an
  Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité de Corse, de la collectivité de Guyane ou de Martinique, d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de directeur de cabinet, directeur adjoint de cabinet ou chef de cabinet en ayant reçu délégation de signature du président, du président de l’assemblée ou du président du conseil exécutif ».

En principe, « les agents salariés communaux ne peuvent pas être élus au conseil municipal de la commune qui les emploie » (alinéa 5 de l’article L.231 du Code électoral ; CE, 8 février 1984, n°53657). Il existe toutefois des exceptions à ce principe. Ainsi, ne sont pas concernés ou frappés par cette inéligibilité « les fonctionnaires publics ou les professions indépendantes qui reçoivent une indemnité de la commune à raison des services qu’ils lui rendent dans l’exercice de leur profession » (exemple : médecin vacataire d’une crèche municipale, voir CE, 9 mars 1984, n°52743), ainsi que « ceux qui, dans les communes de moins de 1 000 habitants, ne sont agents salariés de la commune qu’au titre d’une activité saisonnière ou occasionnelle » (CE, 3 novembre 1989, n°108235 ; CE, 16 mai 1973, n°109236). Mais c’est le juge qui décide si une activité pourrait être regardée ou non, comme une activité saisonnière ou occasionnelle selon le cas d’espèce (CE, 15 avril 1996, n°173770).

Néanmoins, reste éligible une personne dont il n’est pas établi qu’elle a été effectivement employée par la commune ni à quelle date il aurait été mis fin à ses fonctions, mais pour laquelle il est prouvé, par attestation du comptable communal, qu’elle ne perçoit aucune rémunération de la commune (CE, 6 avril 1990, n°109307). De même, selon le dernier alinéa de l’article L.231 du Code électoral, « les candidats qui, au jour de l’élection, auront été admis à faire valoir leurs droits à la retraite sont éligibles » . De plus, le candidat en disponibilité est également éligible (CE, 9 janvier 2009, n°317576 ; CE, 30 décembre 2021, n°448694) ; il est alors placé « hors de son administration » et n’a plus la qualité d’agent salarié de la commune (CE, 16 octobre 1996, n°173889). Il en est de même d’un agent public en congé de fin d’activité anciennement salarié de la commune (CE, 29 juillet 2002, n°236116) et d’un agent placé en position de détachement avant la date des élections, même s’il continue de bénéficier de ses droits à avancement et à la retraite dans son emploi d’origine (CE, 9 février 2012, n°347155). Enfin, sont également éligibles les agents ayant démissionné. Cependant, pour apprécier l’inéligibilité d’un tel agent communal, seule compte la date effective de la fin de fonction et non celle de la démission (CE 1er août 2022, n°463365 et TA de Toulon, 25 mai 2025, n°2501971). A ce titre, est éligible « le chef de cabinet et de la communication du maire dont la démission a été effectivement accepté avant le scrutin, et ce 2 jours avant le scrutin » (CE, 23 octobre 1996, n°177175, n°177265, n°177326).

Un agent salarié d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), qui n’exerce pas une des fonctions visées au 8° de l’article L.231 du Code électoral, est éligible au mandat de conseiller municipal de toutes les communes membres de l’EPCI. Concernant les entrepreneurs de services municipaux par principe inéligibles au mandat de conseiller municipal, ne sont toutefois pas considérés comme tels « des personnes qui n’entretiennent pas directement et personnellement des relations contractuelles présentant un caractère de permanence ni des liens d’intérêt suffisants ou qui n’exercent pas un rôle prédominant au sein de l’entreprise ou de la société cocontractante ». C’est le cas « d’un salarié de la société titulaire d’une convention de restauration passée avec la commune visant à fournir le restaurant scolaire de celle-ci. Il n’exerce pas un rôle prépondérant dans les relations contractuelles entretenues avec la commune où il veut se présenter aux élections » (CE, 3 mars 2021, n°445635).

Certaines activités professionnelles sont incompatibles avec l’exercice d’un mandat municipal (articles L.237 à 239 du Code électoral). Les fonctions de conseiller municipal sont par exemple incompatibles avec celles de militaires de carrière ou assimilé (sauf dans les communes de moins de 9 000 habitants et dans les EPCI de moins de 25 000 habitants, depuis la loi du 13 juillet 2018), de fonctionnaire des corps d’encadrement de la police nationale ou de représentant légal des établissements publics de santé, dans la ou les communes de rattachement de l’établissement où il est affecté. Les agents salariés du centre communal d’action sociale (CCAS) de la commune ne peuvent être élus au conseil municipal de la commune qui les emploie. Le mandat de conseiller communautaire est aussi incompatible avec l’exercice d’un emploi salarié au sein du CIAS créé par l’EPCI. Il est incompatible avec l’exercice d’un emploi salarié au sein de l’EPCI ou de ses communes membres. Une personne en situation d’incompatibilité peut être élue mais devra, dans certains cas, faire cesser cette situation dès lors que l’élection est acquise. Ainsi, au jour de l’élection, pour les incompatibilités visées à l’article L.237 du Code électoral, notamment, l’élu dispose d’un délai d’option de dix jours dès la proclamation de son élection pour choisir entre son activité professionnelle et l’exercice du mandat, à l’échéance duquel le mandat est perdu. En l’absence de délai d’option, le juge, s’il est saisi, met fin à l’incompatibilité en annulant l’élection. Postérieurement à l’élection, tout conseiller municipal qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité prévus par les articles L.46, L.237, L.237-1 et L.238, peut être déclaré démissionnaire par le préfet, sauf réclamation au tribunal administratif dans les dix jours de la notification préfectorale ou recours au Conseil d’État (article L.239 du Code électoral).

— Dernière mise à jour le 27 octobre 2025

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