Loi renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux

La loi n°2024-247 du 21 mars 2024, parue au Journal officiel du 22 mars 2024, vise à renforcer la sécurité et la protection des maires et des élus locaux face à la hausse des violences contre les élus, en particulier des maires (menaces, injures, agressions, harcèlement…), à améliorer leur prise en charge lorsqu’ils sont victimes et à favoriser une meilleure prise en compte des réalités des mandats électifs locaux par le monde judiciaire et les acteurs de l’État. Cette loi contient une série de mesures qui sont la traduction dans la loi d’une partie du plan national de prévention et de lutte contre les violences aux élus, présenté par le gouvernement en juillet 2023. De nombreuses dispositions répressives mais aussi protectrices d’élus locaux (19 articles) sont ainsi consacrées et instaurées dans la législation. Parmi celles-ci, on trouve :

- Sanctions pénales renforcées en cas d’agressions contre des élus (Titre I)

Les peines en cas d’agression contre un élu sont alignées à celles encourues en cas d’agression contre les dépositaires de l’autorité publique, à savoir 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende si les violences ont entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours et 7 ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende si l’incapacité de travail qui en résulte dépasse huit jours (article 1er). Ces peines ont été élargies aux violences contre d’anciens élus (dans la limite de six années après le mandat). Elles sont prévues à l’article 212-14-5 du Code pénal. En présence de circonstances aggravantes ces peines peuvent être portées à 10 ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende. En outre, l’article 2 élargit aux personnes chargées d’une mission de service public, la reconnaissance de circonstance aggravante en cas d’atteinte dangereuse aux biens. Une peine de travail d’intérêt général (TIG) complète les sanctions actuellement prononçables en cas d’injure, d’outrage ou de diffamation publique proférée contre des élus ou d’autres personnes dépositaires de l’autorité publique (article 3). Ce texte de loi consacre aussi la répression pénale de l’atteinte à la vie privée des candidats à un mandat électif public. Elle est élargie aux membres des familles des élus et candidats à un mandat électif public. Une circonstance aggravante au délit de mise en danger de la vie d’autrui est prévue lorsqu’est visé un candidat pendant une campagne électorale (article 4).

- L’automaticité du bénéfice de la protection fonctionnelle pour les exécutifs locaux et son extension aux candidats à un mandat électif public (Titre II)

L’octroi de la protection fonctionnelle est rendu automatique (sans décision préalable du conseil municipal) pour les élus qui exercent des fonctions exécutives (maires et adjoints au maire, anciens maires, victimes de violences, de menaces ou d’outrages qui en font la demande) et le bénéfice de la protection fonctionnelle est également étendu aux candidats à un mandat électif public. Cette loi consacre aussi l’élargissement du bénéfice de l’automaticité de la protection fonctionnelle aux conseillers départementaux et régionaux exerçant des fonctions exécutives (article 5). L’élu bénéficie de la protection de la commune à l’expiration d’un délai de cinq jours francs à compter de la réception de sa demande par la commune s’il a été procédé, dans ce délai, à la transmission de sa demande au Préfet de département ou à son délégué, le cas échéant, et à l’information des membres du conseil municipal. Cette information est portée à l’ordre du jour de la séance suivante de ce dernier. Les dépenses de protection fonctionnelle sont rendues obligatoires pour les communes, départements et régions (article 6).

Par ailleurs, une autre disposition met expressément à la charge de l’État la protection fonctionnelle des maires ou élus municipaux ayant reçu délégation, victimes de violences, menaces ou d’outrages lorsqu’ils agissent en tant qu’agents de l’État (comme officier d’état civil ou officier de police judiciaire) dans les conditions similaires à celles prévues pour les agents publics. La demande doit être adressée au Préfet de département (article 7). L’article 8 rend pleinement applicables les dispositions instituant une protection fonctionnelle aux élus municipaux membres des communautés de communes. Par ailleurs, l’article 10 prévoit la prise en charge par la commune, au titre de la protection fonctionnelle, de tout ou partie du reste à charge ou des dépassements d’honoraires résultant de la prise en charge médicale et psychologique des élus bénéficiaires. L’article 11 concerne l’assurance des risques liés à un mandat électif. Il vise à régler les situations dans lesquelles des assureurs refuseraient d’assurer les locaux utilisés par les élus (ou les candidats) comme permanence. Si un élu ou un candidat essuie au moins deux refus, il peut désormais « saisir un bureau central de tarification » qui « fixe le montant de la prime en contrepartie de laquelle l’entreprise d’assurance intéressée est tenue de garantir le risque ». Une fois cette décision prise, l’assureur qui maintiendrait son refus d’assurer le local concerné se mettrait hors la loi et risquerait de se voir retirer son agrément. Cet article entrera cependant en vigueur le 22 mars 2025.

L’article 12 élargit le bénéfice de la protection fonctionnelle, à la charge de l’Etat, aux candidats ayant déposé leur candidature et ayant effectivement pris part au moins au premier tour de l’élection et ce, pendant toute la durée de la campagne électorale, soit 6 mois avant l’élection et jusqu’au tour de l’élection auquel ils participent. Il prévoit aussi le remboursement des frais de sécurisation des candidats, à compter du moment où le candidat a officialisé sa candidature par une déclaration publique ou, à défaut, par la déclaration d’un mandataire financier. Un décret en Conseil d’État précisera les modalités d’application de ces mesures. Cet article entrera en vigueur un an après la promulgation de la loi.

- Prérogatives des acteurs judiciaires et l’information des maires (facilitation des relations des élus avec le parquet sur les affaires pénales les concernant) – Titre III

Un volet visant plus spécifiquement les acteurs judiciaires est également inclus dans cette nouvelle loi. L’article 13 introduit un mécanisme de dépaysement d’office, dans la juridiction la plus proche, des affaires dans lesquelles un maire ou un adjoint au maire serait mis en cause comme auteur. Le titre III de cette nouvelle loi a notamment pour vocation à renforcer l’effectivité du droit de communication et l’information des maires par les parquets. Il est prévu, à ce titre, la signature de conventions tripartites entre associations d’élus locaux, préfets et procureurs sur le traitement judiciaire des infractions commises contre des élus (article 14). Ce même article impose également un délai d’un mois au procureur de la République pour communiquer les motivations des décisions de classement sans suite pour des affaires résultant d’une plainte ou d’un signalement du maire. Par ailleurs, en vertu de cette loi, les procureurs de la République pourront, dans un espace réservé, communiquer dans les bulletins municipaux sur les affaires en lien avec la commune (article 15).

Enfin, la composition des conseils locaux et intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance est également renforcée. L’article 16 accroit le rôle du procureur de la République au sein des conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD/CISPD) en imposant sa présence au sein des réunions de celui-ci et en facilitant sa représentation par un de ses délégués, spécialisé sur ces sujets. La nouvelle loi précise que sont membres de droit du CLSPD, outre le maire, le préfet et le procureur de la République ou leur représentant, ainsi que, le cas échéant, le président de l’EPCI. Cette loi permet également, lors de la création d’un CLSPD, la désignation d’un agent coordinateur par le Préfet. Cet agent coordinateur, désigné au sein des services de la collectivité locale, ou à défaut, au sein des services de l’État, devra assister le président du CLSPD pour garantir l’animation du conseil. La composition du CLSPD est fixée par arrêté du maire. Une réunion par an au minimum est obligatoire. La loi précise encore que le maire, le préfet ou le procureur peut demander la création d’un groupe thématique chargé des violences commises à l’encontre des élus.

Cette nouvelle loi prévoit, dans un délai de trois mois (donc d’ici à la fin du mois de juin), l’élaboration par le gouvernement de deux rapports. Le premier sur « l’opportunité d’élargir le bénéfice de la protection fonctionnelle à tous les élus locaux, y compris ceux qui n’exercent pas de fonctions exécutives » ; le second « recensant les actions menées pour lutter contre les violences faites aux élus et leurs résultats ».

Lire la loi n°2024-247 du 21 mars 2024, parue au JO du 22 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux

— Dernière mise à jour le 28 mars 2024

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